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Olivier Marquis en mission en Guyane pour l'étude des caïmans noirs

Métiers

10 jours et 10 nuits passés au milieu du marais de Kaw en Guyane pour étudier le caïman noir (Malanosuchus niger), son écosystème et son régime alimentaire. C’est le projet de recherche auquel a participé Olivier Marquis, curateur des reptiles, amphibiens et invertébrés du Parc zoologique de Paris.

1er mai 2014. Olivier Marquis embarque aux côtés d’autres chercheurs (Stéphane Caut, Nicolas Sturaro et Matthieu Bacques) et d’un vétérinaire (Vincent Francois) pour une mission dans la Mare Agami, au cœur du marais de Kaw, réserve naturelle de la Guyane française. Zone protégée et inaccessible par voie terrestre, l’équipe est déposée par hélicoptère sur la station de recherche flottante construite en 2001, en plein milieu du marais.

Jours et nuits, les chercheurs vont approfondir leurs connaissances de l'écosystème et du rôle qu'y joue le caïman noir, seule population du territoire guyanais. "Le chef de mission, Stéphane Caut, chercheur en écologie (CSIC, Espagne), est spécialisé dans l’étude des réseaux trophiques via l’utilisation d’une méthode de dosage de biomarqueurs dans différents tissus biologiques, permettant de retracer les interactions entre espèces, raconte Olivier Marquis. Nous avons appliqué cette méthode pour approfondir nos connaissances sur le caïman noir". L’espèce, présente de l’Amérique Centrale au nord de l’Amérique du Sud et autrefois très commune, a vu ses effectifs chuter de près de 90% au cours du 20ème siècle.

L'équipe de chercheurs en pleine capture d'un caïman noir ©  Stéphane Caut

Analyses le jour, captures la nuit

Sur place, le programme des journées, tout autant que celui des nuits, reste bien chargé. "Les journées étaient consacrées aux piégeages des insectes, des poissons et des oiseaux ainsi qu’ à leur analyse, raconte l’herpétologue. En effet, pour pouvoir établir le régime alimentaire du caïman, il faut pouvoir comparer les biomarqueurs de ses tissus avec ceux de ses proies potentielles". 

À la nuit tombée, l’équipe de chercheurs embarque pour une "chasse aux caïmans" ! Le caïman noir ne se capture que de nuit. En éclairant la surface de l'eau, les yeux brillants du reptile se repèrent de très loin (jusqu’à 200 mètres). Eclairé, le caïman s’immobilise, l’équipe peut alors l’approcher et le capturer au lasso. Une fois muselé et hissé sur la barque (lorsque son poids le permet), l’animal est pesé, mesuré, sexé et pucé pour une identification lors de futures recaptures. Le vétérinaire effectue une biopsie de muscle et de graisse et un prélèvement sanguin pour les analyses, avant de le remettre à l’eau.

Le héron agami, ressource alimentaire du caïman ?

En 2002, il a été découvert sur cette mare, la plus grande population mondiale nicheuse de hérons agami (Agamia agami). D’après les chercheurs, l’oiseau pourrait donc servir de ressource alimentaire aux caïmans, maintenant ainsi cette population à cet endroit. "Nous avons pu observer là-bas quelques cas de prédation des caïmans sur cette espèce" confirme Olivier Marquis. Pourtant, l’oiseau migrateur n’y est présent qu’une partie de l’année. Reste à savoir de quoi le caïman peut se nourrir le reste du temps, s'il ne migre pas. Des éléments de réponse vont être apportés en comparant les résultats de cette mission, réalisée en période de nidification des hérons, aux résultats d’une mission précédente, réalisée en octobre dernier durant la saison sèche, à une époque où les hérons étaient absents.

Cette expédition, financée par le National Géographic, Lacoste et le Parc zoologique de Paris, a pour but d’accumuler des connaissances sur cet écosystème et sur le caïman noir en particulier, pour permettre l’élaboration, la diffusion scientifique et la promotion de stratégies visant à une conservation durable de l’espèce et de son habitat.